À chacun son heure !

« Journal intime  » : 14 ans et 9 mois … 

La série  » 13 reasons why  » fait un carton sur Netflix, une série sur le suicide d’une ado en souffrance, sur le quotidien, sur le harcèlement, sur la solitude d’une ado de 17 ans, 1000 décès par an pour 80 000 tentatives, vous voyez, ça n’arrive pas qu’aux autres !

J’avais 14 ans, je sortais avec un garçon de 18 ans depuis plusieurs mois, ma première vraie histoire, rassurez vous l’histoire aura été belle, nous nous sommes aimés 3 ans, nous nous sommes fiancés, et puis je l’ai quitté, bien trop jeune pour m’engager pour une vie entière …

J’étais plutôt populaire au collège, je faisais partie d’une petite bande, 5 ou 6 garçons, 4 filles, sans vouloir enjoliver la situation, nous étions un peu les têtes d affiche de cet établissement durant cet année 2004 ! Un tableau parfait pour une gamine de 14 ans, vous ne trouvez pas ?

Pourtant j’étais perdue et tellement seule, rappelez vous qu’à cet âge la, tout est décuplé, chaque petite chose prend de l’importance, chaque épreuve nous paraît insurmontable, nous sommes enfermés au présent, le futur est tellement lointain … Sortir avec quelqu’un de plus vieux c’était « cool » mais je n’étais pas prête à ça,  » je suis devenue la « fille facile  » du collège, celle que les garçons convoitent, celle à qui on met une main sur les fesses quand elle passe dans les couloirs, flatteur pour eux, dévastateur pour nous

Lui, il commençait sa vie d’adulte, il fréquentait d’autres personnes, et de ce que l’on me disait d’autres filles, moi, je ne voyais que par lui, il était impulsif, et moi, beaucoup trop jeune … J’avais cette impression sordide d’être enfermée dans une pièce sans aucune issue, comme si je m’éteignais à petit feu. On se disputait beaucoup, beaucoup trop, et puis il y a eu  » la  » dispute… à vrai dire je ne me rappelle même plus pourquoi, sûrement quelque chose que je trouverai ridicule aujourd’hui, mais ce que j’ai ressenti ce jour là je ne l’oublierai jamais, j’étais seule, et je pleurais depuis des heures, j’aurais pu appeler une dizaine de personnes, ma mère sûrement, des amies, un ami, mais ce ne n’est pas ce que j’ai fait, moi face à moi même, l’éternelle bataille de ma vie, alors dans un élan de désespoir, comme un dernier recours, je me suis dirigée vers la cuisine, j’ai cassé un verre, j’ai remonté mes manches , et je me suis lacéré les bras, des poignets jusqu’à la moitié de l’avant bras, je ne voulais pas mourir, enfin je ne crois pas, en tout cas ce n’était pas le but, mais c’était la seule échappatoire, ma seule échappatoire, un simple appel à l’aide, le transfert d’une douleur morale à une douleur physique,une punition, un moyen de me sentir vivante, une grosse connerie, le sang s’est mêlé au larmes et je me suis sentie apaisée, vivante …

La douleur était présente, constante, comme une piqûre de rappel quotidienne, ils sont seulement deux* à avoir découvert ce que j’avais fait, seulement deux à m’être venu en aide, elle, elle m’a engueulée, sermonnée, elle a pleuré, lui, il s’est assis derrière moi, il m’a pris dans ses bras, et il m’a serré fort, tellement fort, il m’en a voulu d’avoir fait ça, je crois qu ils avaient peur pour moi…

Je me suis senti soulagée sur le coup, et puis j’ai fini par regretter mon acte, devoir le cacher à ma mère, à mes proches, j’ai du camoufler mes bras pendant des mois, ce que je pensais comme un geste fort était devenu pour moi une preuve de faiblesse, un geste lâche qui n’a soigné aucun de mes maux, un soulagement éphémère, comme un pansement qu’on arrache, si j’en avais parlé à ma mère, à mes amis, je n’en serait sûrement pas arrivée là, la solitude on la choisit, on s’y conforte, on s’en contente...

On ne prépare pas assez les ados à ce qu’ils vont devoir traverser, on banalise un peu trop leurs sentiments, leurs ressentis, on leur dit bien trop souvent que  » ça passera avec le temps « , mais ce n’est pas ce qu’ils ont besoin d entendre, le temps leur paraît bien trop long ..

Écoutez les, faites les parler, prenez les au sérieux, ne banalisez pas leurs problèmes, montrez leurs que vous êtes là, ne les jugez pas, et ne culpabilisez pas … 

Mes cicatrices représentent ce que j’ai traversé, où j’en suis arrivé aujourd’hui, je n’en suis pas fière, mais je les accepte, les tatouages sont venus atténuer les marques, mais certaines sont toujours visibles, elle me rappellent la chance que j’ai eu de m’être arrêtée à temps, la chance d’être encore en vie , mais combien franchissent le pas ? Combien n’ont pas eu cette chance ?

À tous les ados en souffrance, à tous les parents dépassés, perdus, il y a toujours une solution, une main tendue… Ne lâchez pas …


* Merci a A. & M. 

2 réflexions au sujet de “« Journal intime  » : 14 ans et 9 mois … ”

  1. Toujours aussi poignant et bouleversant ton recit 👏
    J’ai une peur terrible du mal être de mes enfants depuis leur naissance jusqu’à ma mort je ne cesserais d être inquiète pour eux 😘💖

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